Sangsue médicinale : des bienfaits insoupçonnés

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Les sangsues, ces vers que l’on trouve dans les étangs ou les marais, sont les alliées de la chirurgie réparatrice et d’incroyables réservoirs de médicaments.

Un auxiliaire chirurgical à l’aspect repoussant

La sangsue des marais (grise, hirudo medicinalis, ou verte, hirudo verbana), utilisée dès la plus haute antiquité pour soigner certaines affections, fut très prisée par le chirurgien de Napoléon, François Broussais, pour traiter les maladies inflammatoires.

Puis, on oublia ce ver suceur de sang jusqu’à ce que, il y a une vingtaine d’années, la chirurgie plastique et traumatologique redécouvre ses vertus thérapeutiques. Près de 50 centres SOS Main utilisent aujourd’hui des sangsues pour déconges-tionner une plaie délicate ou faciliter la vascularisation d’un lambeau greffé afin d’éviter une nécrose ou une amputation. « Elles contribuent à améliorer le drainage des vaisseaux sanguins en complément des médicaments classiques, lors de réimplantations ou de reconstruction d’orteils ou de doigts broyés ou amputés, explique le docteur Guillaume Gueguen, chirurgien au Centre SOS Main Orléans.

Une fois ventousée, la sangsue affamée pompe l’excès de sang, facilite le retour veineux et injecte de l’hirudine qui liquéfie le sang et dissout les caillots. »

« L’hirudothérapie », c’est son nom, ne procure que des bienfaits au patient, dès lors qu’il a surmonté sa réaction initiale de dégoût. « D’abord surpris, il l’accepte ensuite volontiers, constate le docteur Gueguen. C’est plutôt l’entourage qui a parfois du mal à croire au rôle bénéfique des sangsues. » « La douleur infligée par la morsure s’apparente aux picotements d’une piqûre d’ortie ; au bout de deux ou trois minutes, on ne sent plus rien », ajoute le médecin suisse Dominique Kaehler Schweizer, auteur du livre Thérapie par les sangsues.

Une action anti-inflammatoire, antibiotique et antalgique

En plus de la chirurgie, la sangsue est employée en Europe du Nord et de l’Est pour soulager l’arthrose du genou ou résorber des congestions veineuses superficielles (phlébites, hémorroïdes, varices). « Cette thérapie permet non seulement d’évacuer un excès de sang, explique le docteur Kaehler Schweizer, mais aussi d’injecter dans l’organisme de la salive de sangsue qui a une action anticoagulante, anti-inflammatoire, antalgique et antibiotique. » « Les sangsues, dont la morsure ne provoque ni inflammation ni infection, sont un extraordinaire réservoir de médicaments naturels », confirme le professeur Michel Salzet, directeur du laboratoire de neuro-immunologie et neuro-chimie évolutive des annélides de l’unité CNRS à l’université de Lille.

« Nous nous sommes aperçus que si l’on sectionnait la chaîne nerveuse de la sangsue (l’équivalent de la moelle épinière humaine), elle se régénérait en moins d’une semaine et était de nouveau fonctionnelle un mois plus tard. Nous avons aussi découvert que son cerveau et son corps renfermaient des molécules qui ont une double activité, immunitaire (antibiotique) et neurotrophique (régénératrice du système nerveux), ainsi qu’un régulateur lui permettant de contrôler et d’endiguer l’inflammation lors d’une régénération nerveuse, ce qui n’est pas le cas chez l’homme. » La sangsue pourrait donc un jour fournir des médicaments efficaces contre les affections neurologiques… Et ce n’est pas tout.

« La salive de la sangsue contient d’autres substances actives, des molécules antivirales, antibactériennes, anticoagulantes, anti-inflammatoires et analgésiques, et une bactérie présente dans son tube digestif est capable de tuer des bactéries impliquées dans les infections nosocomiales », précise le professeur Salzet.

Les contre-indications

Elles sont « peu nombreuses et précises », explique le docteur Kaehler Schweizer : hémophilie, anticoagulation, ulcère gastro-intestinal actif, déficit immunitaire, anémie ou encore maladies graves évolutives. « Il est temps que l’hirudothérapie soit réhabilitée dans les pays francophones et y connaisse le succès qu’elle mérite », plaide-t-elle.

Certains médecins continuent en effet à penser que poser des sangsues relève de l’archaïsme, voire du charlatanisme ! Cette thérapie permet non seulement d’évacuer un excès de sang mais aussi d’injecter dans l’organisme de la salive de sangsue qui a une activité anticoagulante, anti-inflammatoire, antalgique et antibiotique.

N’importe quelle sangsue ?

La sangsue utilisée en médecine fait partie de la vaste famille des 650 espèces d’hirudinées. Ce ver annelé, aplati, est muni de deux ventouses, dont l’une abrite sa bouche et sa triple mâchoire en forme d’étoile. Il est plus ou moins long selon qu’il s’étire (10 cm sur 1,5 cm de large à l’âge adulte pour un poids de 3 g) ou se contracte (il ressemble alors à une olive). Cet animal hermaphrodite qui vit dans les eaux stagnantes des marais ou des étangs est un indicateur de la qualité de l’environnement et de la pureté de l’eau.

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